Le code de la route

Le code de la route prépare l’arrivée des voitures autonomes en France

 

Au-delà des défis techniques, la voiture autonome pose des questions réglementaires complexes. La France a publié le 1er juillet un décret pour adapter son code de la route.

Les automobilistes français vont pouvoir lâcher-prise. Jeudi 1er juillet, le gouvernement a publié un décret visant à adapter le code de la route et le code des transports aux véhicules à conduite automatisée. Les acteurs du secteur saluent une étape importante pour préparer l’arrivée des voitures autonomes.

Que va changer le décret ?

«Jusqu’à présent le code de la route ne considérait que le cas de la conduite d’un véhicule par une personne », rappelle le gouvernement. Sur ce point, l’État différencie les systèmes d’aides à la conduite (comme les régulateurs de vitesse) et les systèmes de conduite automatisés. Autrement dit, avant le nouveau décret, l’automobiliste devait théoriquement garder les mains sur le volant en toute situation lorsqu’il circulait. Désormais, les conducteurs pourront déléguer totalement le contrôle dynamique de leur voiture à un système de conduite automatisé, « mais uniquement lorsque certaines conditions seront réunies », prévient l’État.

À titre d’exemple, l’exécutif cite les systèmes automatisés de maintien dans la voie (dit ALKS pour Automated Lane Keeping System). Ces dispositifs sont les premiers systèmes de conduite automatisés à bénéficier d’une autorisation. Ils pourront fonctionner en situation d’embouteillage sur autoroute. « L’ALKS contrôle alors le déplacement latéral et longitudinal du véhicule pendant des périodes prolongées sans intervention du conducteur », décrit le ministère chargé des Transports.

Autre changement important : le décret adapte le régime de responsabilité pénale. « Jusqu’à présent, nous étions toujours dans une logique où c’est le conducteur qui est responsable », fait remarquer Marc Mortureux, directeur général de la Plateforme automobile (PFA). Le nouveau texte permet au conducteur « de dégager sa responsabilité dès lors que le système de conduite automatisé fonctionne conformément à ses conditions d’utilisation. » Il n’est pas question pour l’instant de vaquer à ses occupations sur la banquette arrière pendant que la voiture poursuit sa route. « Lorsque le véhicule est partiellement ou hautement automatisé, le conducteur doit se tenir constamment en état et en position de répondre à une demande de reprise en main », peut-on lire dans le décret.

Le code de la route

Des premiers véhicules homologués en 2021

Les industriels devront naturellement faire homologuer leurs voitures à conduite automatisée. L’exécutif estime que les premiers véhicules de ce type devraient décrocher leur homologation « avant la fin de l’année 2021 ».

Un autre volet du décret concerne le transport de personnes et de marchandises. Pour ces cas d’usage, des systèmes de transport routier automatisés pourront circuler dès septembre 2022 mais sur des parcours ou des zones prédéfinis. Les entreprises devront aussi faire valider des dossiers de sécurité par des organismes qualifiés et agréés avant de pouvoir déployer des navettes automatisées.

« Il va encore y avoir un certain nombre de textes d’application pour préciser des choses plus techniques. Mais au moins le décret fixe de façon assez précise le cadre des homologations et des autorisations à obtenir, analyse Marc Mortureux. C’est une bonne chose parce que les industriels ont besoin d’avoir de la visibilité. »

L’ambition française dans la voiture autonome

Avec ce texte, la France veut se situer dans les pionniers européens de la voiture autonome. En mai 2018, le gouvernement avait dévoilé une stratégie nationale pour s’imposer dans cette course. Selon l’exécutif, c’est la première fois qu’un pays européen met en place un cadre réglementaire complet pour la circulation des véhicules autonomes. « L’Allemagne a commencé à voter une loi mais ils en sont encore au cadre législatif. Nous, nous sommes maintenant dans des textes d’application », compare Marc Mortureux.

Le gouvernement espère que ces évolutions réglementaires inciteront les entreprises à investir dans les voitures autonomes. « Nous donnons dès aujourd’hui à nos industriels et à nos opérateurs de transports la visibilité nécessaire pour les développer – et demain, les faire rouler », encourage dans un communiqué Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des Transports.

Sur ce point, la filière automobile se dit tout de même dans l’attente d’aides publiques. « Au-delà du cadre réglementaire, ce que nous pouvons attendre est un accompagnement sur tous les efforts de R&D parce qu’il y en a encore beaucoup à faire. Il y a tellement d’investissements dans la transition électrique que l’un des grands soucis est d’avoir la capacité de continuer à investir aussi en R&D sur les volets véhicules connectés et véhicules autonomes, parce que c’est une des sources importantes de valeur pour les décennies à venir », insiste le directeur général de la PFA.

La PFA note aussi que certains obstacles demeurent avant de pouvoir faire circuler des véhicules complètement autonomes. « Pour une délégation de conduite complète, c’est-à-dire où il n’y a plus du tout de chauffeur dans le véhicule, il faut de toute façon attendre une modification de la convention de Vienne qui est le cadre international », indique Marc Mortureux.